Inclusivité

L’inclusivité permet une transformation dans son prisme le plus global, de l’individu jusqu’à la société, favorisant la possibilité d’agir et d’exister puisqu’elle vise idéalement à garantir un accès complet aux services du digital : “Parler d’e-inclusion plutôt que de fracture numérique, c’est s’adresser aux 100%“, écrit le Conseil National du Numérique (CNNum). Il ne s’agit pas seulement de diffuser les usages du digital à tous et toutes, mais bien de donner la possibilité d’une culture numérique pour tous et toutes, synonyme d’insertion, d’intégration, d’unification, etc.

Approche de l’usage du numérique en contexte inclusif

Après avoir obtenu un diplôme de Master en recherche à l'Université Lumière Lyon 2 en 2011, Vanessa Bacquelé a enseigné pendant une décennie en classes spécialisées et quelques années de travail en tant que chargée de mission pour la formation continue des enseignants, Vanessa Bacquelé Elle a ensuite rejoint l'Institut des Sciences et Pratiques en Éducation et Formation (ISPEF) de l'Université Lumière Lyon 2 pour entreprendre une thèse au sein du Laboratoire Education, Cultures, Politiques (ECP) dirigé par le Pr Charles Gardou. Sa thèse intitulée « Lire et écrire avec des outils informatiques. Le tissage d'un projet de compensation pour des adolescents dyslexiques » a été soutenue en 2016. Depuis 2017, elle travaille en tant que chargée d'enseignement au sein de l'équipe Pratiques Professionnelles et Apprentissages en Contexte d'Enseignement Spécialisé et donne également des cours à l'Université Lumière Lyon 2 pour le Master « Référent handicap ». Ses recherches se concentrent sur les moyens de faciliter la scolarisation des élèves ayant des besoins éducatifs particuliers, ainsi que sur l'accessibilité des apprentissages par les enseignants. Elle s'intéresse aux pratiques d'enseignement inclusives et plus particulièrement à l'utilisation des aides technologiques pour soutenir les élèves ayant des besoins éducatifs particuliers dans leur parcours scolaire.

Paru en 2019, cet ouvrage est descriptif et argumentatif : il recueille des situations vécues actuellement par des élèves dyslexiques en apprentissage. Il vise à comprendre et proposer de nouvelles solutions numériques pour aider ces élèves. Ouvrage récent, il paraît dans un contexte de revendications de l’opinion publique et traduit la volonté d’inclusion et d’accessibilité au numérique. Puisqu’il se concentre sur l’inclusion scolaire, ce travail paraît aussi après la loi de 2005 qui établit l'engagement de la France sur le chemin de l’éducation inclusive. Selon le Centre National d’Étude des Systèmes Scolaires (CNESCO), l’évaluation des besoins des élèves reste encore très médico-centrée sans prendre entièrement en compte l’environnement social de la personne. Cet ouvrage entreprend de définir et de comprendre ce qui fait obstacle à l’usage des technologies numériques en classe en ayant une approche anthropo-centrée. Il se focalise davantage autour des exigences scolaires et des difficultés de l’élève plutôt que sur la technologie. La première partie, composée de quatre chapitres, fait l’état des connaissances actuelles sur les troubles du langage écrit et la manière dont ils sont appréhendés à l’adolescence. Il donne aussi à voir comment l'école s’est emparée de cette thématique et quelles réponses ont été apportées dans une volonté d’intégrer le numérique dans les moyens d’éducation. La deuxième partie de l’ouvrage propose une réflexion sur les chapitres précédents et pose les ancrages conceptuels, contextuels et méthodologiques pour analyser les situations des élèves présentés. La dernière partie est composée de trois chapitres. Elle expose comment les aides technologiques mènent à une voie d’amélioration des compétences de lecture et d’écriture des élèves dyslexiques et quels sont les divers facteurs et conditions susceptibles de tisser un environnement propice à un usage efficace de ces outils en classe.

Malgré l’ensemble des mesures décidées et mises en œuvre en faveur de l’accueil des élèves à l'École, on compte toujours des réticences et des obstacles réduisant la légitimité de ces mesures dans des établissements scolaires réguliers. Par conséquent, il a été remarqué que le parcours scolaire d’élèves en situation de handicap est plus chaotique que celui d’élèves sans besoins spécifiques et qu’ils peuvent même être plus souvent victimes de brimades. De plus, le manque d’informations des enseignants empêcherait un accompagnement bénéfique des élèves en situation de handicap. Selon l’ouvrage, même la plupart des Écoles qui se dépeignent comme inclusives renferme des tensions professionnelles et des désillusions individuelles et familiales car elles peinent encore à offrir une place pour chacun, quelle que soit sa singularité. L’ouvrage souligne que l'Éducation Nationale, d’après la décision de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH), finance du matériel pédagogique informatique adapté pour certains élèves dyslexiques, avec des logiciels d’écriture et de lecture. Toutefois, l’utilisation de la technologie à des fins éducatives est à la traîne : la connexion, les compétences des enseignants et leur confiance face à l'utilisation de ces outils sont faibles. L’ouvrage de Vanessa Bacquelé met en évidence le rapport direct entre la scolarité des élèves dyslexiques et les aides technologiques (AT), autorisées par la MDPH. Elles sont envisagées comme un médium qui garantit l’accès à l'apprentissage en vue d’une "école pour tous". Les enquêtes Etic, EvaluENT et Profetic montrent cependant que la pénétration du numérique dans le scolaire ne bouleverse pas dans l’immédiat les pratiques pédagogiques. En 2017-2018, seulement 38.6% des élèves présentant des troubles du langage ou de la parole ont pu bénéficier de matériel pédagogique adapté. Il s’agit d’un chiffre significatif montrant encore le besoin de développer de telles aides. Celles-ci peuvent par ailleurs avoir plusieurs fonctions : tutorielles, procédurales, communicationnelles, supplétives et/ou augmentatives. Elles permettent de soutenir l'élève dans les processus d'activité de lecture, par exemple en utilisant la synthèse vocale pour faciliter la compréhension des textes et la révision de ceux-ci. De la même manière, l’exemple de la reconnaissance vocale est tout aussi pertinent. Elle assure une transcription pour l’élève qui se détache alors de toute contrainte écrite. Cela montre alors que les AT permettent aux élèves dyslexiques de s’affranchir de la présence d’un tiers. Les enseignants et les élèves témoignent des avantages et des inconvénients de « l'écriture à l'ordinateur » par rapport à l'écriture manuscrite, notamment en ce qui concerne la relecture et la vitesse de frappe. Pour les élèves présentant des troubles du langage écrit, la reconnaissance vocale peut faciliter la production écrite mais peut entraîner des erreurs syntaxiques et la capacité de révision peut dépendre de la capacité de lecture fluide. Les outils informatiques spécifiquement conçus pour la lecture et l'écriture peuvent aider en favorisant la mise en relation des spécificités de l'élève avec les fonctionnalités de la machine et les particularités du savoir enseigné. Selon l'UNESCO et Loiselle et Chouinard (2012), les AT sont des solutions technologiques qui permettent aux élèves en situation de handicap d'accéder à l'apprentissage ou de réaliser des activités scolaires de manière autonome. En général, ces aides favorisent l'équité en répondant spécifiquement aux besoins des élèves concernés. Les Technologies de l'Information et de la Communication pour l'Enseignement (TICE) permettent d'exonérer temporairement un élève de la mise en œuvre de procédures cognitives de bas niveau pour lui permettre de mettre en jeu et développer des compétences de plus haut niveau. Les AT peuvent également favoriser la réflexion pour faciliter le raisonnement et l'organisation de la pensée, ainsi que la consultation et l'échange des ressources. Fougeyrollas et Blouin (1989) avancent que l'aide technologique peut compenser la déficience en augmentant la capacité fonctionnelle de l'élève. Pour cela elle est pensée sur deux champs d'ergonomie pour les AT : la cognitivité -en lien avec l’aspect cognitif de l'élève-, et l’utilisabilité -c’est-à-dire la capacité du produit informatique à être facilement utilisé pour la fonction qu’il est censé remplir-. Il faut cependant que l’outil soit adapté à la fois pour l’élève, mais également pour l’enseignant qui doit être formé à l'utilisation de ces outils qu’il devra intégrer dans ses démarches pédagogiques. L'étude de Fichten et al. (2013) prend en compte un autre facteur. Il indique que les étudiants ayant des troubles d'apprentissage peuvent éviter de manière volontaire l'utilisation des AT pour ne pas être perçus comme “différents”. Il y a donc une démarche identitaire de la part des étudiants qui peuvent avoir des difficultés à “divulguer leur handicap” pour accéder aux outils numériques. Cet obstacle n’est cependant pas le seul puisqu’en 2010, Messinger-Willman et Marino en classent de nombreux selon trois catégories : situationnels (manque de fonds, manque de ressources, manque de temps, etc.), institutionnels (manque de spécialistes d’AT, technologies peu fiables, AT inadaptées, etc.) ou bien relationnels (rejets des AT par l’enseignant ou l’élève). Ceci montre la difficulté encore aujourd’hui de faire pénétrer les AT dans le domaine de l’éducation.

Gardou, C. (2012) :La société inclusive, parlons-en !Toulouse Perriault, J. (2002) :Education et nouvelles technologies : théories et pratiques.(Paris) Rousseau, N., Paquet-Bélanger, N., Stanké, B., et Bergeron, L., (2014) :Pédagogie universelle et technologie de l’aide. In N. Rousseau et V. Angelucci (dir.),Les aides technologiques à l’apprentissage pour soutenir l’inclusion scolaire.(Québec) Benoit, H.(2013). Distorsion et détournement des dispositifs inclusifs : des obstacles à la transition vers de nouvelles pratiques ? La nouvelle revue de l'adaptation et de la scolarisation, 61, 49-63. Perrenoud, P. (2010). De l'exclusion à l'inclusion : le chaînon manquant. Éducateur, 13-16. Récupéré du site de l'Université de Genève : unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_2010/2010_05 Prud'homme, L., Vienneau, R., Ramel, S., et Rousseau, N. (2011). La légitimité de la diversité en éducation : réflexion sur l'inclusion. Éducation et francophonie, 39(2), 6-22. Doi : 10.7202/1007725ar

  • 80% Des personnes en situation de handicap ont des handicaps invisibles.

E-inclusion, dispositifs pour les personnes en situation de handicap

E-inclusion : l'intersectionnalité comme facilitateur

Le rejet de la différence par la norme à l'ère du numérique a mené nombre de minorités à se réunir pour former des communautés en ligne. Qu'il s'agisse de communautés queer ou de personnes handicapées, cette approche oscille entre l'intégration et l'inclusion, générant des safe spaces qui permettent l'exploration identitaire à l'abri de valences négatives immédiatement amenées par le hors-norme. Nous nous risquerons ici à dresser un parallèle entre identité de genre et handicap invisible, tel les TSA, confrontés à la norme afin de dégager l'intersectionnalité comme facilitateur d'inclusion numérique. 

Thomas Brunel de Montméjan

Est chercheur associé au laboratoire MICA, dans l'axe ADS. Il interroge la culture populaire et la science-fiction, leur impact sur le corps et sa construction identitaire, réelle ou fictive.

Un alien retrouve son peuple : comment Tik Tok m'a poussé à chercher un diagnostic TSA/TDAH

Diagnostiqué en tant qu'adulte, je suis l'un des nombreux individus qui pendant le confinement ont remis en question leur neurotype "typique". C'était un parcours éprouvant, de larmes et de rires, durant lequel les réseaux sociaux numériques furent une aide inestimée ; grâce à eux, j'ai eu accès à des ressources qui m'ont permis de mieux me comprendre et à une communauté d'adelphes neurodivergent.e.s. Lors de mon intervention, je retracerai mon parcours personnel et j'évoquerai mon expérience de la construction sociale de la neurodivergence.

Noor Kamaruzzaman

Rediffusion